Une militante russe de 19 ans condamnée à près de 3 ans de prison pour un poème ukrainien anti-guerre
“Moscou n’a jamais remporté la victoire finale, et ne le fera jamais”: c’est pour ces mots que Daria Kozyreva a été condamnée à deux ans et huit mois de prison par un tribunal de Saint-Pétersbourg vendredi 18 avril. La chaîne américaine CNN rapporte que l’activiste russe de 19 ans était accusée d’avoir “discrédité” l’armée russe à plusieurs reprises, après avoir collé des citations extraites d’un poème ukrainien sur une statue de la ville.
Deux ans après le début de la guerre en Ukraine, la jeune Russe avait été interpellée le 24 février 2024 après avoir été surprise en train de placarder des vers d’un poème, baptisé “Mon testament”, sur la statue d’un poète ukrainien du XIXe siècle, à savoir Taras Chevtchenko:
“Oh enterrez-moi, puis levez-vous – Et brisez vos lourdes chaînes – Et arrosez avec le sang des tyrans – La liberté que vous avez gagnée”, pouvait-on lire sur la statue en question.
“L’histoire jugera, et jugera équitablement”
À l’audience, Daria Kozyreva a reconnu et assumé son geste, expliquant que l’Ukrainien Taras Chevtchenko était son auteur favori. Né à Kiev en 1814, dans une région appartenant à l’empire russe, le poète s’est imposé comme un artiste résistant à l’oppresseur russe. Ce vendredi, cette militante a profité de l’audience pour prononcer d’autres extraits du poème, avant de développer les raisons de son geste.
Selon elle, le poète Taras Chevtchenko n’aurait pas été surpris par la guerre en Ukraine amorcée par la Russie le 24 février 2022. “L’histoire de la Russie présente une caractéristique frappante: quels que soient les détenteurs du pouvoir (…), leur régime semble régi par une sorte de religion qui leur interdit de laisser l’Ukraine tranquille”, a-t-elle défendu devant les juges.
Et de poursuivre: “Moscou n’a jamais remporté la victoire finale. Et ne le fera jamais. Le peuple ukrainien ne le permettra pas. Il en a assez”. “Moscou n’a pas conquis l’Ukraine. Le drapeau national flotte toujours sur Kiev, et il le fera toujours. (…) L’histoire jugera, et jugera équitablement. Mais l’Ukraine a déjà gagné.”
Une série d’actions anti-belliqueuses
La jeune femme a déjà été condamnée par la justice russe à une amende de 30.000 roubles – l’équivalent de 320 euros – en décembre 2023 pour diffamation envers l’armée russe. À l’époque, elle avait été exclue de la faculté de médecine de Saint-Pétersbourg, après avoir affirmé sur un réseau social russe que “des soldats, des travailleurs” étaient “envoyés à la mort dans cette boucherie” où ils deviendraient eux-aussi “des meurtriers”.
Un an auparavant, Daria Kozyreva avait été arrêtée pour avoir écrit “Assassins, vous l’avez bombardée. Judas” sur une infrastructure dédiée au jumelage entre les villes russes et ukrainiennes de Saint-Pétersbourg et Marioupol, cette dernière désormais sous le joug de la Russie.
La directrice de l’ONG Amnesty International en Russie Natalia Zviagina a déploré cette nouvelle condamnation et appelé à “sa libération immédiate”. Il s’agit, selon elle, d'”un nouveau rappel effrayant de jusqu’où les autorités russes sont prêtes à aller pour faire taire l’opposition pacifique à leur guerre en Ukraine”.
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