Bayrou a un plan pour tarir les déserts médicaux sans braquer les soignants, mais c’est la « dernière chance »

POLITIQUE – Ce n’est pas fromage et désert. François Bayrou et plusieurs de ses ministres sont dans le Cantal ce vendredi 25 avril pour parler du système de soins. Plus précisément, pour annoncer la stratégie du gouvernement visant à repeupler les déserts médicaux, ces zones sur les territoires français qui manquent cruellement de soignants.
C’est l’un des premiers engagements pris par le centriste depuis sa nomination à Matignon, le sujet figurait d’ailleurs parmi ses quatre axes de travail présentés aux partis politiques mi-mars 2025. Pour cause, « la situation actuelle est plus qu’intolérable. Elle met en péril notre pacte républicain », selon les mots d’un conseiller gouvernemental, qui évoque « six millions de Français » privés d’accès au soin.
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Un mois après ces promesses, quel est donc le traitement du docteur Bayrou ? Une stratégie vaste, de la formation à l’organisation des soins, censée permettre au gouvernement de s’éviter le sujet éruptif de l’installation des médecins. C’est « la dernière chance d’apporter des solutions en matière de santé », explique-t-on au gouvernement, « faute de quoi, des options plus contraignantes seront privilégiées. »
Un pacte, plutôt que la coercition
Pour l’heure, on comprend donc que l’exécutif ne retient pas la piste explosive qui revient à supprimer (ou presque) la liberté d’installation des médecins après leurs études. Une option, défendue par le député PS Guillaume Garrot, validée à l’Assemblée nationale, et justifiée un temps par François Bayrou. Finalement, le Premier ministre garde cette carte dans la main.
« On ne choisit pas la voie de la fin de la liberté d’installation. On choisit de faire confiance aux professionnels », plaide ainsi un conseiller, en espérant que les annonces seront de nature à faire dégonfler la grogne massive, notamment chez des jeunes médecins, agacés de voir les règles changer en cours de route. À la place, le chef du gouvernement opte donc pour l’inscription dans le droit d’un « principe de solidarité et de responsabilité territoriale. »
Concrètement, tous les médecins (généralistes et spécialistes) devront à terme consacrer obligatoirement deux jours par mois à des consultations dans des territoires identifiés comme les plus sensibles au manque de soignants. Ceux qui s’y plieront sans rechigner bénéficieront de « contreparties financières », selon ces mêmes sources, les autres seront « pénalisés. »
Résultat attendu : plusieurs dizaines de millions de consultations réorientées, « là où on en a besoin. » « On croit beaucoup à cette solution », nous dit-on dans l’entourage des ministres concernés, notamment parce qu’elle mise sur la coopération des médecins entre eux. Et ne se limite pas aux cas des étudiants ou jeunes professionnels, seuls concernés, par définition, par la liberté d’installation. « Il est toujours plus facile de demander peu à beaucoup de médecins, que de demander beaucoup à peu de médecins », résume encore un conseiller.
Stage en zone rural, pharmaciens mobilisés…
Ce n’est pas tout. Le Premier ministre, pour ne pas avoir à sortir l’artillerie lourde, entend donc multiplier les petits coups de scalpel, çà et là . Ainsi, le chef du gouvernement veut avancer sur la formation des médecins, et le recrutement des jeunes dans les territoires ruraux. Objectif : que chaque département puisse proposer une première année de médecine sur place, quand une trentaine en sont dépourvus actuellement.
« La probabilité que les médecins et soignants s’installent à proximité de leur formation est extrêmement forte », indique-t-on encore au gouvernement. Dans cette même logique, il sera bientôt demandé aux étudiants de consacrer obligatoirement un de leurs stages (en milieu de cursus) à une zone rurale ou un désert médical. Loin des villes et des grands hôpitaux. Une façon de soulager quelque peu les professionnels sur place, et, surtout, de favoriser ici encore l’installation des jeunes dans ces territoires. Le nerf du désert.
Parmi les autres pistes dévoilées par le gouvernement, après un mois de consultation au ministère de la Santé, on peut citer également la simplification de l’accueil des médecins non-européens, l’amélioration du retour des jeunes Français formés à l’étranger ou le projet de réformer la sélection des étudiants, pour l’adapter « aux besoins des territoires. »
Le gouvernement veut aussi faire monter en compétences tous les professionnels du soin, pour permettre par exemple aux pharmaciens de traiter les otites, les sinusites et autres besoins de santé du quotidien. Ou aux infirmières de prescrire certains médicaments. Une façon, là aussi, de libérer du temps dans l’agenda des médecins. « On veut apporter des réponses immédiates à la population, martèle le conseiller d’un ministre, pour répondre à cet abandon de la République. » Si possible, en préférant la pommade à l’opération.
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